Sale petit bonhomme, il ne portait plus d'ailes, Plus de bandeau sur l'œil et d'un huissier modèle, Arborait les sombres habits Dès qu'il avait connu le krach, la banqueroute De nos affaires de cœur, il s'était mis en route Pour recouvrer tout son fourbi. Pas plus tôt descendu de sa noire calèche, Il nous a dit : "je viens récupérer mes flèches Maintenant pour vous superflu's. " Sans une ombre de peine ou de mélancolie, On l'a vu remballer la vaine panoplie Des amoureux qui ne jouent plus. Avisant, oublié', la pauvre marguerite Qu'on avait effeuillé', jadis, selon le rite, Quand on s'aimait un peu, beaucoup, L'un après l'autre, en place, il remit les pétales; La veille encore, on aurait crié au scandale, On lui aurait tordu le cou. Il brûla nos trophé's, il brûla nos reliques, Nos gages, nos portraits, nos lettres idylliques, Bien belle fut la part du feu. Et je n'ai pas bronché, pas eu la mort dans l'âme, Quand, avec tout le reste, il passa par les flammes Une boucle de vos cheveux. Enfin, pour bien montrer qu'il faisait table rase, Il effaça du mur l'indélébile phrase : "Paul est épris de Virginie. " De Virgini', d'Hortense ou bien de Caroline, J'oubli' presque toujours le nom de l'héroïne Quand la comédie est finie. "Faut voir à pas confondre amour et bagatelle, A pas trop mélanger la rose et l'immortelle, Qu'il nous a dit en se sauvant, A pas traiter comme une affaire capitale Une petite fantaisie sentimentale Plus de crédit dorénavant. " Ma mi', ne prenez pas ma complainte au tragique. Les raisons qui, ce soir, m'ont rendu nostalgique, Sont les moins nobles des raisons, Et j'aurais sans nul doute enterré cette histoire Si, pour renouveler un peu mon répertoire Je n'avais besoin de chansons.