Ses yeux restaient devant les miens Ils ne voulaient pas s'en aller Je leur disais "Allez-vous-en !" Ils restaient là comme s'ils étaient plantés Alors, je les ai chassés à coups de bâton, à coups de pieds Mais il suffisait de les chasser pour les voir arriver au grand galop Pour les voir se replanter devant mes propres yeux, devant mon propre nez Alors, j'ai été chercher de l'ail J'ai pelé des oignons et je les ai fait pleurer Mais les yeux restaient Ils avaient pris racine Ils ne voulaient pas s'en aller Alors, comme je voyais bien que je ne pourrais pas les chasser Je les ai laissés entrer chez moi Ils ont mangé à ma table mon pain et ont partagé tout ce que j'avais Et surtout tout ce que je n'avais pas Alors, ces yeux-là sont devenus les miens Et les miens sont devenus ceux-là