Il l'a vue descendre du vingt-deux bis La lionne aux yeux fendus, myosotis La salope, la vendue, la Gladys Que tous ses matins maudissent Elle s'est engouffrée soudain dans la Buick La moto n'était pas loin, rue Lepic Joe a démarré comme un hystérique À revers du sens unique Boulevard des Maréchaux ça hurlait Gladys et sa Buick et Joe sa Harley La vie, la vitesse, les dessoudaient Les saoulaient Et courir, courir jusqu'à mourir Jusqu'à se précéder d'un pas Et courir, courir de peur en pire Mourir ou pas À la porte Clignancourt Elle a fait brusquement un demi-tour Ça chauffait la banlieue qui tout autour Étouffait, les suivait d'un œil mauvais Après l' marché aux puces La Buick a évité un autobus En tout cas Joe a mis des gaz en plus À Bichat elle allait payer tout ça, nom de Dieu ! Tous les souvenirs en vrac qui reviennent Gladys dans les bras de Jack, rue de Vienne Un micheton qui roule un mac Ça dégénère dans la haine, forcément Et courir, courir jusqu'à mourir Jusqu'à se précéder d'un pas Et courir, courir de peur en pire Mourir ou pas Elle a pris sur le périph' la Défense Joe fonçait comme un shérif de l'enfance Son orgueil sortait ses griffes. Sa souffrance Exaspérait sa violence Elle a, se voyant suivie, Fait le tour du bitume, des parvis Des détours Elle a lancé un défi sombre et sourd Au motard fou de l'amour, le con ! À Nanterre, le couchant dans les yeux Il a percuté d' plein champ l'auto bleue Dans un cri, ont dit les gens, d'amour, de rage et d'adieu Et courir, courir jusqu'à mourir Jusqu'à se précéder d'un pas Et courir, courir de peur en pire Mourir ou pas Et courir, courir jusqu'à mourir Jusqu'à se dépasser d'un pas Et courir, courir de peur en pire Mourir... là !